Témoignage : Assistante trilingue, elle se lance dans le crochet et détricote de nombreuses idées reçues

Virginie est originaire de l’Est de la France, plus précisément de la Haute-Saône, un département situé en plein cœur de la Bourgogne-Franche-Comté. Elle grandit et s’épanouit sur ces terres, qui forment le berceau familial et y effectue avec succès des études de commerce international. Une fois son diplôme en poche, elle succombe à l’appel des cigales et du soleil méditerranéen et part pour le Sud de la France. Durant plus de vingt ans, elle goûtera à la douceur de vivre provençale, assouvira sa soif d’apprendre et réalisera un parcours professionnel sans faute…

Et pourtant, à l’aube de la cinquantaine, Virginie prend une décision radicale : elle plaque son job, et la Côte d’Azur, pour retrouver sa région natale et se lancer dans une activité artisanale. C’est uniquement animée de sa passion, et riche de quelques tutos, que celle qui aura passé plus de dix ans à se former dans le commerce et le management se lance dans sa nouvelle carrière : le tricot ! Voici maintenant trois ans qu’elle a retrouvé – avec bonheur – son petit village de Haute-Saône, et qu’elle y fabrique de magnifiques sacs et accessoires en ficelle de jute.

Découvrez l’histoire de cette reconversion professionnelle, aussi audacieuse qu’insolite :

« Le soleil ne suffit pas à rendre heureux »

C’est en 1993 que Virginie pose ses valises dans les Alpes-Maritimes. Elle démarre dans la logistique, mais, mue par l’ambition de gravir les échelons dans le commerce, elle continue à se former en parallèle. Elle enchaine alors les formations à un rythme effréné.

Elle est consécutivement coordinatrice réglementaire trilingue, assistante commerciale export, puis, assistante administrative et commerciale dans une entreprise de télécommunications basée à Sophia Antipolis, la Silicon Valley provençale !

Tout cela ressemble à une expatriation réussie, Virginie, alors pourquoi y avoir mis fin ?

Virginie : « Curieusement, alors qu’avec mon compagnon, nous vivions le rêve de bien des Français – de bons jobs, bien rémunérés, dans une région où il fait bon vivre, et le soleil brille 300 jours par an –nous ne nous sentions pas pleinement heureux… La chaleur, les embouteillages, la cohue estivale… Nous avions l’impression d’étouffer dans cette région. Alors que nous commencions à envisager de bouger, un double drame a précipité les choses. J’ai perdu, en 2018, à deux jours d’intervalle, deux êtres chers. La question, alors, ne s’est même plus posée. J’ai négocié une rupture conventionnelle et je suis immédiatement rentrée chez moi, auprès des miens, avec mon compagnon ».

« Dévier et adapter n’est pas renoncer »

Si son retour dans sa région s’est fait plus vite que prévu, Virginie n’est pourtant pas partie le nez au vent. Cette fanatique de tricot a conçu, durant ses heures creuses, un concept novateur d’aiguilles en 3D, et elle décide de se lancer dans un projet entrepreneurial… Dépôt à l’INPI, fab lab, prototype, Virginie la littéraire se transforme en ingénieur, bien décidée à donner vie à ces aiguilles qui vont révolutionner le tricot !

Aujourd’hui, ton activité professionnelle consiste à fabriquer des sacs et accessoires. Qu’est devenu ton projet industriel ?

Virginie : « Malheureusement, ma trajectoire – comme tant d’autres – a été contrariée par l’arrivée de la pandémie. Contrainte de suspendre mes démarches, je me suis mise au tricot & crochet, cette passion qui me vide la tête (j’appelle cela ma tricothérapie !). Ayant réalisé au crochet, un petit sac en ficelle de jute pour l’offrir à une amie, je me suis rendu compte que le concept plaisait. En plein Covid, je me suis mise à augmenter mes cadences et ai commencé à vendre quelques-unes de mes créations. Le déclic s’est alors fait tout naturellement, et je me suis lancée corps et âme dans cette aventure ; en attendant la reprise de mon projet initial ».

« Le crochet n’est ni ringard, ni « has been » ! »

Virginie ne laisse rien au hasard. Tricoter et crocheter c’est bien, optimiser son commerce, c’est mieux ! Elle prend contact avec la chambre des métiers, opte pour un statut d’auto-entrepreneur, réalise un business plan, se forme à la gestion, à la communication, au numérique, assiste à des webinars… Elle crée elle-même son site internet (creationsjeannie.com), ses fiches produit, réalise ses shootings, se forme au SEO, anime ses pages Instagram et Facebook (@creationsjeannie), prépare ses colis, et tricote/crochète autant que faire se peut !

Quel planning ! Ne t’es tu pas trouvée un peu dépassée par l’ampleur de la tâche ?

Virginie : « Non, car j’ai mobilisé les compétences acquises dans ma première vie professionnelle pour donner corps à mon projet. Je suis certes quelquefois épuisée, mais je suis pleinement heureuse. J’ai le sentiment d’avoir pris mon destin en mains, et choisi ma voie ; et cela n’a pas de prix ! Le seul hic, c’est que, travaillant de chez moi et vivant de ma passion, les gens ne considèrent pas que j’ai un métier… C’est un peu frustrant de s’entendre dire « heureusement que tu ne travailles pas », alors que je m’investis 10 heures par jour dans mon projet ! ».

« Se mettre à son compte est difficile, mais avec de la volonté et de la bonne énergie, on abat des montagnes ! »

Après plus d’un an d’activité, si la demande est au rendez-vous, la rentabilité, elle, tarde à montrer le bout de son nez. La chambre des métiers qui l’accompagne, lui conseille de mieux valoriser les longues heures qu’exigent chacune de ses créations. Mais, Virginie met un point d’honneur à rester dans des gammes de prix abordables, et cherche donc d’autres leviers de rentabilité : elle travaille sur des modèles nécessitant moins d’heures de fabrication, elle négocie de meilleures conditions avec ses fournisseurs, elle diversifie ses circuits en procédant à des dépôts-ventes et en participant à des manifestations (marchés d’été, salons, marchés de Noël) … L’aventure se poursuit en attendant la « next step » : ses aiguilles 3.0 !